À Nancy, les journées où le soleil pointe le bout de son nez sont aussi rares qu’un évènement hip-hop auquel Les Gars Du Coin ne sont pas associés. Depuis cinq ans, le collectif initié par Ektir, El Lobo et Cotchei enchaîne les performances sur les scènes locales et organise sa traditionnelle Machine À Rappeurs. Avec une mixtape prête à sortir et de nombreux projets solo à dévoiler, 2018 s’annonce comme l’année de tous les possibles.
Comment vous êtes-vous rencontrés ?
Ektir : Avant LGDC, il y avait Le Saloon. On était cinq avec El Lobo, Cotchei, Fovea, Kaocé Sédi et moi-même. Nous avons fait les premières parties de plusieurs gros concerts grâce à Pierre, le programmateur du Chill Up Festival. Quelques projets par-ci, par-là. Courant 2015, on a créé La Machine À Rappeurs, un open mic fédérateur avec des musiciens et des DJs. Nous en avons organisé 23 sur les trois dernières années. Les MCs des alentours avec qui nous nous sommes le mieux entendus ont rejoint LGDC. Au moment où je te parle, on doit être 10 dans le collectif. Il faut garder à l’esprit qu’avant d’être un groupe de rap, nous sommes une communauté.
Vous avez sorti plusieurs EP solo. L’album est sur le grill ?
E : Il ne s’agit pas vraiment d’un album mais davantage d’une mixtape. Un produit fait maison de A à Z qui comporte 11 titres enregistrés sur un laps de temps assez large. Notre ingénieur du son Négroïde peaufine les derniers détails, ça ne devrait plus tarder. D’autres projets individuels arrivent en parallèle. Le premier en date sera Aloha, de Gavabon, Rimkeuss et Griff. On passe la deuxième pour 2018 !
Vous travaillez toutes vos maquettes ensemble ?
E : Forcément. Nous nous retrouvons plusieurs fois par semaine dans le même studio, sans parler de nos petites beuveries (sourire). Les tracks tournent et sont plus ou moins validés de cette façon. Un solo qui sort de l’écurie LGDC reste, dans le fond, un travail de groupe.
Lobo : On se mélange quand même de temps en temps. L’an dernier, j’ai sorti Azrael avec Azra, un beatmaker de Toulouse. Cotchei s’était associé en 2016 aux musiciens de The NCY Milky Band pour L’Ascenseur, un trois titres complètement incroyable ! J’aime particulièrement parler de ces deux projets car ce sont les premiers que nous avons sortis en physique.
Quel est votre schéma d’enregistrement ?
E : Nous avons pris l’habitude de louer un chalet, sans Internet, dans les Vosges et de ramener le studio sur place. On s’enferme et on gratte des textes, la nature pour seule témoin. On doit bouger de Nancy pour que la magie opère. Les derniers détails sont, par la suite, travaillés à domicile.
L : Tu t’es trompé, on loue une villa dans les Îles Baléares (rires) !
Vous avez des envies d’ailleurs ?
L : Nous nous sommes déjà produits à Toulouse et même au Kazakhstan. La sortie du projet devrait faire bouger les choses. Le dernier Chill Up a été le déclic. On était en première partie de Caballero, JeanJass et Roméo Elvis. Notre public a répondu présent, c’était le feu !
Woodsdad : Ça ne sert à rien d’être connu si tu ne fais pas de concerts dans ta ville. Il nous reste encore quelques pions à placer à Nancy, mais on ira où le vent nous portera.
Au Kazakhstan ?
L : On a saisi l’opportunité en acceptant une proposition de l’Alliance française, en juillet 2016. Un groupe de potes musiciens, M.A BEAT !, était également convié. Notre premier show s’est fait dans un bar. Plus tard, dans la semaine, nous avons joué pour une grande réception en présence de Francis Étienne, l’ambassadeur de France au Kazakhstan de l’époque. C’était le soir de la finale de l’Euro, tout aurait pu être parfait… Nous y sommes retournés en octobre. Une locale du milieu de la mode nous a logés dans un cinq étoiles, c’était la première fois que je dormais à l’hôtel (sourire). Cette fois, on a fait un seul concert, accompagnés de musiciens kazakhs. Sacrée expérience !
Votre participation aux End Of The Weak était-elle dans l’unique but de vous exporter ?
E : On a gagné quelques éditions locales avec Lobo. Ça nous a offert une nouvelle visibilité, les mecs de la région nous contactent plus souvent.
L : On y participe avant tout parce que le concept nous plaît, mais aussi parce que les répercussions sont colossales pour le collectif. Les Buzz Booster et autres Rap Contenders ne nous intéressent pas.
Comment concilier votre envie d’expansion et le fait d’être indépendants ?
Rimkeuss : C’est compliqué de faire de la musique. Il y a très peu d’argent dans les caisses et nous devons trouver où enregistrer, qui va produire les visuels…
E : LGDC, c’est surtout de l’entraide. Des potes graphistes, cinéastes… On commence à les rémunérer grâce à nos premiers cachets, mais c’est encore tout nouveau. Être indépendant n’est ni une volonté ni une fatalité. Nous sommes un groupe amateur et aucun d’entre nous ne veut se professionnaliser dans le rap. On n’a pas encore été frapper à la porte des labels, mais si l’opportunité se présente, on n’hésitera pas ! D’ailleurs, Gavabon a récemment été enregistrer un son à la 75e Session, le studio parisien où ont enregistré Sopico, Népal et Di-Meh.
Gavabon : C’est la marche la plus haute avant le prochain palier. On rencontre des artistes qu’on écoute depuis cinq ans, c’est fou quand on y réfléchit !
Pour conclure, avez-vous un feat rêvé ?
L : Une voix féminine apporterait la touche qu’il manque au crew.
E : Le rêve serait Cesària Évora.
Trev : Je valide ! Et toi Woodsdad, tu n’as pas envie d’inviter Roméo Elvis sur un de tes titres (sourire) ?
W : C’est vrai qu’on se parlait un peu à une époque, puis je suis monté et il est resté sur place. Nous n’avons rien pu faire ensemble. Il avait du talent, mais la mayonnaise n’a pas pris (rires)…
Texte : Nathan Barbabianca
Crédit : Julian Pierrot