Josman, 26 ans, rappeur aux influences outre-Atlantique plus que françaises, a sorti son premier album studio le mois dernier. Majoritairement produit par Eazy Dew, J.O.$ assume les ambitions pécuniaires de son titre, et lâche le feu sans sommation.
Jos’ est avant tout connu pour ses qualités de kickeur. Rookie sacré champion End Of The Weak Paris en 2013, il entre avec assurance dans Le Cercle en 2017, seulement deux ans après Échecs Positifs. L’année qui suit ce premier EP prometteur voit naître « Matrix », morceau éponyme d’un projet trap qui le révèle au grand public. Un titre au discours pessimiste et à l’ambiance sombre qui prépare le terrain pour 000$. Depuis, Josman suit ses rêves de très près. Choyé par les médias et soutenu par un public grandissant, il est apparu comme égérie Jordan et sur la première mixtape de Neymar, titillant encore plus le rêve américain.
« J’suis en flammes j’ai la force »
Soucieux de soigner son identité visuelle, Josman fait appel à Marius Gonzalez, responsable de la majorité des clips de l’artiste, dont « Loto », premier extrait du projet. Présent jusque sur la pochette de l’album, le feu s’annonce comme un symbole d’embrasement musical et de puissance financière. La détresse et la rage dans la voix, le rappeur nous partage sa détermination à réussir dans la musique pour pouvoir enfin subvenir aux besoins de ses proches.
Le Vierzonnais d’origine revient aux fondamentaux avec « L’Occasion ». Sur une prod old school, il nous livre un texte aux fausses allures d’egotrip parsemé de spleen. L’influence de Temps Mort est explicite. La plume de Jos’ n’y est que plus acérée et semble avoir été trempée dans la résine de cannabis en guise d’encrier.
J.O.$ tourne parfois en rond, mais des titres comme « WOW » ou « J’aime bien! » sortent du lot. Le fond ne change pas. La forme évolue vers un rap chanté plus assumé. Le projet tient ses promesses bien que les fans de la première heure pourront regretter un album plus riche en style qu’en introspection.
L’apport d’Eazy Dew, producteur stellaire
Producteur occasionnel d’Isha, Lomepal, ou encore Caballero & JeanJass, Eazy Dew a également occupé la place d’arrangeur pour Veerus et son excellent Iceberg Slim. C’est en 2015 que Josman et lui collaborent pour la première fois. Emprunt d’une certaine alchimie, le duo n’a de cesse de se reformer depuis, laissant derrière eux le hit « Dans le vide », morceau le plus emblématique de leurs carrières respectives.
« Eazy Dew, pétasse ! » remet le couvert sur J.O.$ en produisant 13 des 16 titres de l’album. Pour la plupart très réussies, les instrus évoquent un univers à la fois futuriste, ludique et sombre en accord avec les thèmes abordés par son acolyte. Mention spéciale au titre « TIM€ » qui allie samples d’horloge, sonorités perçantes et rythmique binaire, illustrant le passage du temps à une vitesse supersonique dans la vie du rappeur.
La recette fonctionne, mais la fusion du binôme peine à surprendre à chaque morceau. Quelques redondances et un manque de prise de risques peuvent laisser l’auditeur exigeant sur sa faim. Le projet remplit malgré tout sa mission première : faire bouger les têtes.
Avec toujours aucun featuring depuis Échecs Positifs, Josman incarne l’idée d’une autarcie rare dans le rap français, qui n’exclut pas professionnalisme et qualité. Plutôt pensé pour intégrer les playlists, J.O.$ est un album conséquent qui contient de très bons bangers, porté par un beatmaker dans l’air du temps et un MC en pleine ascension.
Texte : Raphaël Tcheng
Crédit : Marius Gonzalez